Et après le Coup d’Etat au Niger… ?

Publié le par Marinchen

Quelques journaux français en ont parlé dans leur édition du 19 Février, quelques uns se sont inquiétés pour moi et mon départ prochain direction Niamey et puis en deux, trois jours silence radio. Alors finalement qu’est-ce qui s’est passé ? « Encore un Coup d’Etat en Afrique….ça ne change pas beaucoup de d’habitude… » entend on à droite, à gauche pour alimenter les clichés. Mais que s’est-il réellement passé au Niger ?

Le Coup d’Etat a eu lieu en pleine journée le 18 Février dernier à Niamey. Il a été organisé par un groupe de militaires qui a destitué le président Mamadou Tandja et a mit un terme à la sixième République du Niger. Le président a été conduit en résidence surveillée et les Ministres levés de leurs fonctions. Le Conseil Suprême pour la Restauration de la Démocratie (CSRD) a donc décidé de suspendre la 6ème République et de dissoudre toutes ses institutions tout en s’engageant à respecter les conventions et traités internationaux dont le Niger est signataire. Le couvre-feu n’aura duré que 24 heures, les frontières terrestres et aériennes ont été rouvertes au bout de deux jours. Le dimanche des Nigériens manifestaient déjà dans les rues de Niamey leur soutien aux militaires.

Ce Coup d’Etat n’arrive pas par hasard. Le président déchu, Mamadou Tandja était au pouvoir depuis le 22 Décembre 1999, élu à la majorité par le peuple nigérien. Celui-ci avait fait son apparition sur la scène politique du Niger accompagnant le général Seyni Kountché lors du Coup d’Etat de ce dernier en 1974. Ironie du sort, c’est au tour de Tandja de se faire bouter hors du palais royal par les putschistes. Celui-ci était arrivé en 2009 au terme de ses deux mandats constitutionnels et aurait dû lâcher les rennes du pouvoir à la fin de l’année. Cependant prétextant la nécessité absolue de finir les grands travaux entrepris sous son deuxième quinquennat, Tandja avait modifié la Constitution afin de se maintenir au pouvoir, en organisant un référendum qui lui aurait laissé trois années de répit avant les prochaines élections. Mettant en avant sa volonté de poursuivre « l’œuvre de construction nationale », son slogan devient le Tazarce, ce qui signifie en Haoussa « continuer sans s’arrêter ». Ces manœuvres présidentielles conduire le paysage politique nigérien à se scinder en deux : d’un côté les partisans de Tandja favorables au Tazarce, les autres refusant un troisième mandat. En réalité Tandja avait signé des dizaines de contrats miniers et pétroliers au cours des dernières années et ne voulait pas partir en si bonne voie, alors que cette nouvelle manne financière commençait à arriver chez lui. Ses opposants politiques, des journalistes, des observateurs ont dénoncé ce qu’ils ont appelés un véritable coup d’état constitutionnel.

Ainsi comme le souligne justement Emmanuel Gregoire, chercheur à l’IRD, « même si l’intervention de l’armée est unanimement dénoncée par l’Union africaine et d’autres institutions internationales ainsi que les chancelleries occidentales, cette condamnation relève du principe tant elle apparaissait comme la seule issue possible à la crise politique qui était dans une impasse totale. »

Et maintenant ? Cela fait plus de trois mois que les militaires ont investi le palais présidentiel à Niamey avec à sa tête le commandant Salou Djibo (qui a étudié en Chine !!), nommé président de la transition. Des membres de tous horizons, de la société civile, du secteur privé, de la diaspora ont été nommés à des postes clés le temps que les prochaines élections soient organisées. Ce ne sont pas des politiques, beaucoup sont très jeunes et plutôt techniciens. Les membres du CSRD se sont d’ores et déjà déclarés inéligibles et ont annoncé une transition de 12 mois jusqu’au prochain rendez-vous électoral. Actuellement un comité consultatif composé de 131 membres issus des principales couches socio professionnelles de la société nigérienne se penche sur la nouvelle Constitution, en cours d’élaboration. Le mot d’ordre est la restauration de la démocratie et la bonne gouvernance. Un nouveau code électoral a été proposé à la junte et au gouvernement ce matin lundi 24 Mai par le Conseil Consultatif après l’adoption de celui-ci par le Parlement. Celui-ci se base sur le code électoral élaboré en 2004 en apportant certaines innovations telles que l’obligation aux candidats à l’élection présidentielle d’avoir entre 35 et 70 ans et d’être titulaire d’un bac + 3 minimum. Le texte mentionne également l’interdiction faite aux membres de la junte, à ceux du gouvernement et aux agents des Forces de défense et de sécurité de se présenter aux prochains scrutins. Il semble qu’il reste un travail de titan avant la fin de l’année 2010 afin de réformer les institutions de la République et faire la lumière sur des dossiers traités de manière opaque par le précédent gouvernement. Certains éléments tendent actuellement à faire penser à une évolution positive de la transition, une volonté de rupture et de démocratisation des institutions et de la vie politique. Cependant il faut garder à l’esprit que 4 coups d’Etat se sont enchaînés au Niger depuis l’indépendance nationale et que la refonte du système politique ne se fera pas en un clin d’œil. A suivre...donc.

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
D
<br /> Nous te suivons toujours avec intérêt,mais il n'y a rien ces derniers jours?<br /> Bon courage.Mille tendresses.<br /> <br /> <br />
Répondre
F
<br /> Hello Marinette,<br /> Nous pensons bien à toi dans nos alternances de jours chauds et plus frais.Gros bisous de Colombes et d'Orbec,<br /> Flo<br /> <br /> <br />
Répondre
C
<br /> C'est fou, un coup d'Etat positif !<br /> <br /> <br />
Répondre